Installé dans ses nouvelles fonctions le 30 août 2022, Adama Dao a bien voulu nous accorder une interview. L’entretien a porté sur son parcours, ses stratégies pour apporter une dynamique à l’éducation et aussi sur sa relation avec les mouvements syndicaux. Lisez plutôt !
Adama Dao est né le 02 septembre 1976 à Nouna. Après l’obtention du BEPC en 1995 au Lycée provincial de Nouna, il a intégré l’école de formation des enseignants du primaire de Bobo-Dioulasso en 1997. A l’issue de la formation en 1999, il a servi à Zienkuy vers Safané dans la province du Mouhoun jusqu’en 2001 où il est nommé Directeur. Il a occupé cette fonction pendant 14 ans, étant admis au concours des Instituteurs principaux en 2009. C’est en 2017 qu’il a fini sa formation d’Inspecteur de l’enseignement du premier degré. Il était à la tête de de la Circonscription d’Education de base (CEB) de Doumbala jusqu’à sa nomination à la tête de la DPEPPNF Kossi. Ces services rendus lui ont valu d’être décoré Chevalier de l’ordre des Palmes académiques en 2021.
Parallèlement à ses tâches pédagogiques et d’encadrement, il a décroché en candidat libre le Bac A4 puis une Licence et un Master II en philosophie à l’Université Joseph Ki-Zerbo de Ouagadougou.
L’analyse de Adama Dao sur la situation actuelle de l’éducation nationale
« Les problèmes que traverse l’éducation sont à l’image de la profonde crise sécuritaire dans laquelle se trouve notre pays aujourd’hui. Le secteur de l’éducation qui regroupe la majorité des fonctionnaires de la fonction publique, touchant presque 85% des enfants scolarisables de notre pays et représenté par les écoles dans les villages les plus reculés, apparait comme la première victime directe en terme de nombre de personnes affectées et de conséquences sociales. En effet, l’objectif est de saper tous les efforts de développement par la promotion de l’analphabétisme et de l’ignorance. Fort heureusement, les autorités du MENAPLN ont pris la bonne mesure des choses en créant un secrétariat chargé de l’éducation d’urgence. A travers ce programme, on peut dire que tous les acteurs se battent pour assurer la continuité éducative en dépit de la fermeture massive des classes et de l’empêchement quasi automatique des enseignants au travail. L’éducation nationale traverse donc l’une des pires crises de son histoire depuis l’accession de notre pays à son indépendance et c’est la raison pour laquelle nous sommes condamnés, nous acteurs à ‘’éduquer ou à périr’’ ».
Accusé à tort ou raison d’être un ‘’casseur’’ de syndicat, Adama Dao réagit et décline sa vision de collaboration
<< Je ne le savais pas mais je me réjouis qu’on me donne ce nom si c’est dans le bon sens. En effet, la préoccupation principale de tout responsable est de pouvoir remplir sa mission efficacement sans bagarre avec ses agents qui comptent presque 99% dans la réussite de sa mission, ni frustration mais avec rigueur, égalité et équité dans ce qu’il fait. Pour casser les luttes syndicales, plusieurs théories existent mais chacune présente des limites et le plus souvent les théories machiavéliques ne peuvent pas tenir longtemps. Alors, ayant compris ces insuffisances, moi j’ai toujours opté pour une gestion inclusive partout où j’ai eu la chance de diriger. La démarche est basée sur la communication, la transparence, l’inclusion, la responsabilisation, le respect des principes conclus, la promotion du mérite. Pensez-vous réellement qu’on peut combattre une décision à laquelle on est associé ? Je crois que non. Si tout se passe comme on le désire, sur quoi peut-on se fonder pour faire la bagarre sans être en contradiction avec soi-même ? C’est difficile. Quand il n’y a pas de bagarre, ceux qui sont loin de vous diront que le chef a corrompu les responsables, ou qu’il les maitrise ou encore qu’il a cassé le syndicat et patati patata. Alors, si c’est ça casser un syndicat je suis désolé vraiment. Le syndicat n’est pas un adversaire mais un partenaire et tous ceux qui sont dans cet esprit ne peuvent que réussir leur mission car l’incompréhension est le lit de toutes les dérives. L’adage populaire le dit si bien : ‘’si tu crois que tu peux nuire à quelqu’un il faut aussi croire que la personne peut te nuire’’ et bonjour le cercle vicieux. Pour moi, rien ne vaut le dialogue et le respect ».
Ses engagements
« A la tête de la direction provinciale, je souhaite vivement instaurer un climat propice à la participation de tous et impulser ainsi une dynamique de coresponsabilité dans la gestion des questions éducatives dans la province. Nous pouvons réussir pour peu qu’on respecte les ainés qui vont s’ouvrir à nous et qu’entre nous, nous nous entendons sur des principes d’équité, de mérite, d’égalité, d’écoute et de reconnaissance. Je suis prêt à tenter cette expérience avec tous les partenaires sans aucune discrimination (syndicat, APE, AME, COGES, projets etc).
Avoir la confiance des plus hautes autorités de l’éducation est un honneur, un privilège mais aussi un défi tant l’enjeu est grand surtout en période d’insécurité. J’ai vraiment la chance d’avoir des agents assez compétents dans les différents bureaux de la DPEPPNF. Je ne doute point de leur accompagnement. Mais, l’enjeu dépasse la seule compétence des agents des CEB et de la DPEPPNF. C’est justement pour cela que je vais axer mes actions sur la mobilisation de tous les acteurs afin de mettre nos intelligences en synergie d’actions pour sauver ce qui est possible d’être sauvé ».
Son appel à l’endroit des enseignants
« Les enseignants sont beaucoup affectés et nous devons le reconnaitre. Mais qu’on le veuille ou pas, que la société soit reconnaissante ou pas, les enseignants représentent l’espoir d’une nation. Je voudrais donc demander à tous les enseignants de la Kossi de changer de paradigme en se mettant ensemble dans le respect, tout en évitant les petites mesquineries, pour se donner des idées de résilience afin d’assurer la continuité éducative et éviter à notre pays le chaos programmé. J’ai pleinement confiance en chacun d’eux car si l’enseignant s’engage, il peut faire des choses exceptionnelles. Mon souhait le plus ardent est que vivement notre pays retrouve sa paix d’antan >>.
Issa Mada Dama
Timbanews.net